visite d'une ruche

Disparition des abeilles – problèmes de la filière apicole en France

La filière apicole est en grande difficulté en raison de facteurs environnementaux mais aussi sociétaux…

Vous trouverez ci dessous un état des lieux sommaire et non exhaustif, et quelques pistes pour surmonter ces difficultés.

Une prise de conscience et des actes rapides sont nécessaires, tant par les politiques que par le grand public. Sinon, on ira tout droit vers ce que les colapsologues appellent très justement l’effondrement…

La disparition des abeilles n’est pas un chiffon qu’on agite pour attirer l’attention. Elle est déjà en marche mais fortement ralentie par la filière apicole qui lutte en permanence contre ce destin funeste.

Les abeilles ont besoin de l’homme pour survivre mais l’homme a aussi besoin des abeilles…

cet article est en cours de rédaction et sera complété et développé en fonction de mes disponibilités.

Difficultés et menaces pour nos apiculteurs,

nos abeilles,

… et pour nous….

La liste des causes de la disparition des abeilles et des difficultés de la filière apicole est tellement longue et vaste qu’un ouvrage serait nécessaire pour aborder chaque point en détails. Je vais donc tenter de la résumer au minimum tout en ménageant des liens permettant au lecteur d’approfondir chaque sujet séparément s’il le souhaite…

Il n’y a pas de classement par ordre d’importance parce que pour chaque cause, l’urgence est plus ou moins aigue d’un pays à l’autre ou d’une région à l’autre…

Il est à noter que si nous les apiculteurs nous nous considérons comme une filière, ce n’est pas le cas des pouvoirs publics qui nous voient plus comme un secteur! Ce manque de considération par l’administration en dit long sur les raisons de l’inaction et pourquoi on en est là aujourd’hui… L’abeille est vue comme une sentinelle de l’environnement, l’apiculteur comme un lanceur d’alerte, et on sait le sort que l’on réserve aux lanceurs d’alerte dans notre société actuelle…

Les facteurs environnementaux liés à la disparition des abeilles

1 – le réchauffement climatique est une véritable et la plus importante menace existentielle pour les apiculteurs (et donc notre sécurité alimentaire et la biodiversité…) et pour les abeilles; il est responsable des difficultés suivantes, qui ne feront que s’aggraver, s’amplifier et se dégrader pour les siècles à venir en raison de la quantité des émissions de GES déjà émises et qui continueront à produire leurs effets pour des siècles…

Deux vidéos indispensables pour comprendre la dimension des problèmes à venir dans l’agriculture:

video 1 :  agriculture et changement climatique

video 2 :  le lien entre les énergies et l’agriculture

video 3:  conférence sur la mortalité des abeilles

Problèmes et difficultés engendrées par le réchauffement climatique pour la filière apicole:

– assèchement des sols et diminution voire disparition des ressources nécessaires à la survie des abeilles, baisse tendancielle des récoltes, aléas plus nombreux (intensité et fréquence des phénomènes extrêmes);

– sécheresses, canicules et disettes compromettant l’élevage des larves et le renouvellement des générations (une abeille ne vit que 50 jours …), fragilisant la structure des rayons par fonte ou déformation des cires, pouvant provoquer des désertions et des pillages;

– diminution ou disparition de la rupture de ponte hivernale nécessaire à la rupture du cycle de ponte de varroa, au repos (et à la durée de vie) de la reine, à la modération de la consommation des réserves (et donc davantage de visites de contrôles et de nourrissement);

– décalage (avancement) des floraisons à un moment peu profitable pour les abeilles (durée du jour courte, températures basses, peu de nectar…) et allongement des périodes de diète estivales;

– présence du frelon plus précoce et populations / nids plus importants et nombreux en été et automne, présence de la fausse teigne sur une plus longue durée;

– conditions de travail plus pénibles au rucher et en miellerie; je développe un peu : nous devons suivre nos colonies en permanence pour des aspects sanitaires, des récoltes, et les préparer aux transhumances. Ces opérations sont rendues particulièrement difficiles et pénibles au delà de 28-30 degrés en raison des tenues de protection. Naturellement les températures peuvent monter jusqu’à 38-40 en été… et sur des périodes plus longues et des occurrences plus fréquentes (4 canicules en 2023…); cela entraine une fatigue et une usure de l’organisme avec des véritables impacts et risques sur notre santé (déshydratation, calculs rénaux, accidents cardiaques ou vasculaires cérébraux, crampes, tendinopathies…et accidents de la route…);

Tous ces aspects induisent une baisse tendancielle des récoltes, un alea plus important (tout ou rien), des coûts d’exploitation en hausse, compromettant à terme la survie des exploitations et donc la présence de l’abeille domestique dans nos territoires (puisque sans l’apiculteur, la disparition des abeilles en tant qu’auxiliaire pour la pollinisation de nos cultures sera définitivement actée).

Il faut malgré tout noter que ce n’est pas la survie de l’abeille sur Terre qui est menacée (elle est là depuis 120 millions d’années, a survécu a 2 extinctions de masse et nous survivra…) mais notre propre survie en tant qu’espèce, tout du moins à 7 milliards d’individus… Et dans le cadre de la fin des énergies fossiles et donc de l’agriculture intensive, le changement de modèle nécessitera des paysans, de l’eau et des auxiliaires comme les pollinisateurs…la partie est donc loin d’être gagnée au train où vont les choses…

2 – la monoculture et ses travers : l’usage immodéré et inapproprié des pesticides, les OGM et autres croisements

La monoculture a un principal inconvénient : la disparition des ressources florales et de la biodiversité, cad la capacité de la nature à pourvoir à des ressources alimentaires aux pollinisateurs tout au long de l’année. En jetant les bases de l’agriculture moderne, l’homme a complètement transformé les paysages d’Antan : l’urbanisation et les infrastructures ont retiré des espaces naturels; la monoculture et l’agriculture intensive, la culture de céréales, de vigne, d’oliviers, de betteraves, de pommes de terre, de salades, on transformé nos campagnes en déserts pour les pollinisateurs;

Pire, la présence illimitée de ressources en un même lieu a accentué la pression des prédateurs de ces plantes, nécessitant l’emploi d’insecticides (parfois systémiques et persistants dans les sols comme les néonicotinoides), de fongicides, de désherbants et d’engrais. Sans compter les modifications génétiques pour tolérer les désherbants foliaires ou systémiques…

Les semenciers ont également fait graver dans la loi une liste de semences autorisées et fait interdire la vente des variétés anciennes, portant un coup très grave à leur pérennité, leur usage futur, et à la biodiversité.

Enfin, la recherche de meilleurs rendements a poussé les semenciers a mettre sur le marché des plants autofertiles ou hybridés de sorte à ne plus procurer de nectar ni de pollen aux pollinisateurs (ex.: colza, tournesol), qui s’épuisent à butiner des ressources devenues impropres à leurs besoins.

Bref, le monde d’aujourd’hui n’est non seulement plus approprié à la survie des pollinisateurs mais les cultures empoisonnent les derniers individus qui tentent de survivre. Dans ces conditions et pour l’abeille domestique, seul le travail de l’apiculteur permet de renouveler les 30% de pertes annuelles moyennes, au détriment des récoltes et au prix de transhumances incessantes.

Pour couronner le tout, les procédures d’homologation des phytosanitaires induisent des biais importants vis à vis de leur mise en oeuvre (restriction aux heures de butinage, mais rarement respecté dans la vie réelle), de leur toxicité moyen terme (la plupart s’arrêtent à une DL50 apres 6 jours…) et les effets cocktail non étudiés. L’Europe a d’ailleurs ajourné la ré-écriture des procédures d’homologation, cédant ainsi au lobby de l’agrochimie et de l’agriculture intensive.

3 – les maladies et varroa destructor

Le premier cas de colonie française infectée par des varroas date du 1er novembre 1982.
C’était dans le Bas-Rhin, à proximité de la frontière allemande, où l’invasion de varroa avait déjà été repérée. Le varroa est originaire d’Asie du Sud-Est et peut anéantir une colonie en 1 à 2 ans. Se reproduisant dans le couvain operculé, il se disperse dans toutes les ruches d’un rucher au printemps via les mâles (faux bourdons). Comme il se nourrit de l’hémolymphe de la larve ou de l’abeille, il entraine des malformations congénitales, une baisse de la résistance aux maladies et la dispersion des virus et bactéries dans la ruche, amplifiant les maladies du couvain ou de l’abeille adulte et induisant une baisse sévère des rendements de production.

Conférence sur varroa destructor

Conférence sur le traitement estival de varroa

Conférence sur les résistances de varroa aux médicaments disposant d’une AMM (acaricides) et une autre lien

Le problème de varroa est donc toujours d’actualité. De nombreux instituts (ITSAP, ADAs, Cari…) travaillent aujourd’hui sur la lutte par sélection de colonies souches génétiquement résistantes (caractère VSH) notamment en France et en Belgique, mais aussi par la technique du couvain chauffé mais qui reste extrêmement compliquée à mettre en oeuvre dans le cadre d’une exploitation de taille moyenne ou grande.

Il faut également bien comprendre que l’absence de maîtrise de varroa rend impossible la survie de colonies « sauvages » dans l’environnement et donc en dehors de l’intervention de soins de l’apiculteur, il ne peut plus y avoir de colonies sauvages… Donc sans apiculteur, finies les abeilles en tout cas là où nous vivons / cultivons mais aussi pour les plantes qui en ont un besoin crucial pour se reproduire…

On est donc d’ores et déjà en mode survie et en voie d’extinction. C’est très important de bien comprendre ce point pour agir sur notre avenir…

Des solutions pratiques et peu onéreuses existent bien (bandelettes à base d’acide oxalique) mais restent interdites par les autorités sanitaires en France (sous la pression du lobby des laboratoires et des vétérinaires (ANMV) ?…) car ne disposant pas d’AMM. La DGAL a d’ailleurs menacé les apiculteurs qui feraient usage de telles modalités de destruction de la récolte et des colonies pour les contrevenants dans un courrier… Pourtant des milliers de tonnes de miel sont importées de différents pays comme l’Argentine (4000 t/an) ou la Roumanie sans que visiblement cela leur pose de problème, ce qui montre la déconnexion totale entre les autorités et les apiculteurs et met encore une fois en exergue la concurrence faussée entre produits importés et réglementations nationales contraignantes et contre-productives…

On peut également rajouter au tableau noir de ces dispositions le fait que les molécules conventionnelles (phytosanitaires) utilisées dans le cadre de la lutte contre varroa comme l’amitraze, le tau-fluvalinate, le coumaphos et autres laissent des traces indélébiles dans les cires (au même titre que les insecticides ou fongicides ramenés à la ruche par le butinage des abeilles sur des cultures traitées : on trouve en moyenne entre 12 et 20 substances à des taux divers dans les échantillons analysés…) et parfois dans le miel, fort peu soumis à des analyses d’ailleurs sauf dans la filière bio….

Enfin la point de vue très discutable des autorités (ministère et responsables régionaux) qui laissent sous entendre que les apiculteurs ne savent pas s’occuper des problèmes sanitaires et qu’ils sont responsables des mortalités aigues, pour ne pas remettre en cause notre mode d’agriculture, est à la fois choquant et facile. Une manière pour des incapables et des irresponsables de botter en touche pour ne pas s’occuper des vrais problèmes…

4 – le frelon asiatique et les autres nuisibles

Apparu un peu avant 2004, le frelon asiatique (nigrithorax ou vespa velutina) a rapidement occupé toutes les régions de France hormis certaines zones de moyenne/haute montagne. Il a également été repéré en Belgique, Luxembourg, Allemagne, Suisse, Italie du Nord et Espagne. Il représente une menace considérable pour nos colonies. Malgré de nombreuses initiatives et annonces d’inventions miracle en tous genres (pièges, harpes électriques, muselières, tentatives de localisation par puces électronique ou goniométrie, appâts empoisonnés (interdits…), poules ) on n’a pas à ce jour  de solution efficace et ce prédateur cause de gros dégâts à une période où les colonies sont censées se refaire la cerise pour l’hiver.

A titre personnel le frelon cause environ la perte de 15 colonies par an, soit 5% du cheptel, et un manque à gagner de 10 000 euros d’une année sur l’autre. Une grosse épine dans le pied qui handicape sérieusement voire compromet la survie des exploitations dans certaines régions malgré des centaines de milliers d’euros dépensés par les collectivités comme le conseil général Alpes Maritimes ou l’Ardèche dans la destruction des nids.

5 – la concurrence avec les abeilles sauvages

Ce thème cher aux « défenseurs des abeilles » est apparu depuis 5 ans en raison de la multiplication des parcs naturels régionaux. L’abeille domestique est suspectée de porter préjudice aux abeilles sauvages et sa présence est depuis fortement controversée et restreinte dans ces parcs. Si objectivement on peut effectivement admettre la concurrence, la question se pose de la place de l’abeille domestique dans notre environnement… Si on ne veut plus la voir en trop grand nombre dans les parcs ni en ville, et qu’elle ne peut plus être à la campagne à cause de nos modes d’agriculture, où alors est sa place ? 

Il faut noter qu’il y a cinquante ans ces questions ne se posaient pas et pourtant, il y avait autant de ruches…l’abeille domestique est elle devenue le bouc émissaire pour masquer la véritable raison de la disparition des abeilles sauvages, à savoir l’action de l’homme sur son environnement ?

facteurs réglementaires, sociétaux et commerciaux

1 – la distribution du miel (et des produits agricoles), la déconnexion du citoyen avec la nature et les producteurs

Il est clair que la majorité des citoyens ne font plus le lien entre l’abeille et leur panier, les importations, camions frigorifiques et entrepôts froid aidant…Le problème principal étant que sans vendre du miel il n’y aura plus d’apiculteur et que sans apiculteur il n’y aura plus d’abeilles… Acheter du bon miel produit localement, au delà de se faire plaisir, c’est assurer sa sécurité alimentaire présente et future. Mais visiblement cette compréhension et cette interdépendance échappe à la population, essentiellement urbaine et plus préoccupée par la fin du mois que la fin du monde, et aux acteurs de la distribution et politiques dont seule la vision court terme est leur ré-élection ou les marges commerciales…

2 – les menaces existentielles sur certaines filières (châtaignier, sapin, lavande…)

Les forêts de châtaignier sont malades et menacées par l’accumulation et les coups de boutoir des sécheresses, de canicule et les insectes xylophages ; idem pour les forêts de sapin.

Idem pour la lavande avec en plus une surproduction d’huile essentielle en France et en Europe (Bulgarie) et pendant 2 ans, le risque qui a pesé sur cette filière de classement de l’huile en produit chimique… des plans d’aide à l’arrachage ont été votés et des champs entiers de plants de lavande de 1 et 2 ans ont été arrachés (quel gachis !); en 2 ans 30% des surfaces ont disparu.

Or la la miellée de lavande est la miellée historiquement régulière sur laquelle la majorité des apiculteurs de Provence comptent pour sauver leur saison. Pour certains, la production se résume à 70 à 100% uniquement de miel de lavande…

Cette situation, si elle se poursuit, va faire tomber des exploitations à terre. C’est certain. C’est à la fois le signe encore une fois du réchauffement climatique, mais aussi aggravé par des facteurs réglementaires concomitants comme des décisions absurdes de l’Europe…

Pour couronner le tout, certains champs de lavande (secteurs Albion et Ouest-Valensole) ont été ravagés en 2023 par des chenilles venues d’Afrique.

3 – les réglementations (cahier des charges bio, prophylaxie, étiquetage, homologation des phytos)

Ce § sera développé lorsque les modalités du nouveau cahier des charges bio seront connues.

En ce qui concerne la prophylaxie, les soins aux abeilles notamment contre varroa destructor, ce sujet est abordé plus en détails plus bas dans cet article, de même que le sujet préoccupant des phytosanitaires qui est récurrent et pas pris en charge de manière sérieuse par les pouvoirs publics (qui n’assument guère le pouvoir dont ils se revendiquent pourtant…)

4 – la mondialisation et les échanges commerciaux, la fraude et l’absence de contrôles et de traçabilité

C’est aujourd’hui le principal facteur qui nuit à la fois à la confiance du consommateur et à la pérennité économiques des apiculteurs (concurrence faussée et biaisée, laissant trop de pouvoir aux importateurs, conditionneurs et distributeurs dans leurs négociations avec les producteurs locaux).

Il faudrait que pour chaque fût qui rentre ou qui circule en Europe il y ait un certificat d’authenticité avec un QR code qui permette la traçabilité du lot et qui se retrouve in fine sur l’étiquette de chaque pot. Ce QR code permettant à chaque consommateur de consulter une base de données où se trouveront les informations suivantes :

– Origines du ou des miel(s) : pays/zones de production/producteur/année de production

– Résultat de l’analyse pollinique (origine florale et composition probable)

– Résultat de l’analyse glucidique (détection ou présence de sucres exogènes).

– Résultat de l’analyse de recherche multi-résidus (traces de substances phytosanitaires et métabolites)

– Suivi (fiche de vie) : par où et par quel(s) intermédiaire(s) a transité la marchandise?

Monter un tel laboratoire et le faire tourner, c’est un budget de quelques millions d’euros annuels. Les importations, c’est un peu plus de 70 millions d’euros. Au vu des marges réalisées il est tout à fait envisageable et souhaitable de faire supporter ces coûts par les importateurs.

Si à ce jour ce n’est pas fait c’est pour des mauvaises raisons politiques, par manque de courage, par désintérêt…ou bien le contraire (par intérêt du gain…). Dans tous les cas ce sont de mauvaises raisons…

A l’heure de la start-up nation et de l’IA qu’on glorifie de tant de mérites, on est toujours dans un monde de magouilles moyenageuses sur le marché du miel… n’est ce pas très cher Président ? En même temps on ne peut pas s’en mettre plein les fouilles et s’occuper des intérêts des Français et des producteurs….fliquer les gens et fliquer les marchandises n’ont manifestement pas le même niveau de priorité et peu importent les fraudes…

Anecdotiquement le fait de vouloir faire rentre l’Ukraine dans l’UE alors que ce pays fait partie des plus corrompus n’est pas un bon signe donné pour aller vers plus de transparence…

4 – les spécificités sociales et fiscales liées à l’apiculture, l’organisation des marchés et foires, la distorsion de concurrence et la concurrence déloyale

Ce chapitre mérite une analyse fiscale, économique, sociologique profonde et complète, qui ne sera pas détaillée ici mais séparément. Mais il est évident que faire cohabiter sur un même marché des individus ou des structures n’ayant absolument pas les mêmes enjeux (amateur, semi-pro, pluriactif, pro…) ni contraintes (sociales, fiscales, qualitatives (IGP ou bio…)) est un jeu d’équilibriste compliqué où il est impossible de respecter les intérêts des uns et des autres sans les favoriser ou les défavoriser.

Au-delà des différences, la présence continuelle et assidue sur un ou plusieurs marchés sous-tend une contrainte de disposer en permanence d’une gamme variée et achalandée, ce qui pose la question de l’origine des miels dans un environnement où les récoltes sont de plus en plus aléatoires…

5 – la démission de l’état, des collectivités, les restrictions aux espaces publics (Parcs, Forets, villes…)

6 – la perte du goût liée aux changements de nos modes de vie et à l’influence néfaste des grands groupes industriels de l’alimentaire et de la distribution

De manière indéniable, nos modes de vie ont radicalement changé en moins d’un siècle. La course à la productivité a entrainé des modifications profondes dans notre alimentation et notre rapport au gout. La recherche systématique du moindre cout, de la moindre seconde de temps libre, de baisse des contraintes, l’éloignement et la disparition des producteurs, le foisonnement de chaines de restauration rapide et plats ultra-transformés s’est traduit par une baisse globale très importante du goût et du discernement sur la qualité nutritive et donc sur notre santé. Il est naturellement toujours possible de bien se nourrir avec des produits sains, de bonne qualité et de budget raisonnable à condition de vouloir faire l’effort de se les procurer (Amaps…) et de cuisiner. Malheureusement la recherche effrénée du moindre cout et du profit fait que sur la majorité des étalages, les produits proviennent de loin ou très très loin au détriment des petits producteurs locaux. L’agrochimie et le pétrole ont favorisé les monocultures et la concentration des exploitations au détriment de la qualité, la diversité….et la proximité (et donc, la disponibilité et la possibilité de faire des arbitrages…). Concernant le miel, et en raison de sa nature non périssable et peu dangereuse d’un point de vue sanitaire, les abus ne sont que très peu pénalisés au regard des marges générées. Un distributeur peut se procurer facilement des tonnes à des tarifs dérisoires (1,80 à 2,00 euros/kg) et le revendre entre 13 et 15 euros/kg, générant ainsi des marges faramineuses.

De ce fait, l’essentiel du miel consommé provient d’importations (35 000 tonnes sur les 45 000 soit 77%) constitué essentiellement de miels de grandes cultures sans véritables qualités ni intérêt gustatifs. Sur le reste produit en France, la moitié également provient de grandes cultures… Statistiquement, le consommateur trouvera donc 9 pots sur 10 présentant un intérêt gustatif moyen ou faible, ce qui ne permet ni de développer le goût ni de stimuler l’envie d’en consommer… Or on sait qu’en l’absence de discernement sur la qualité du produit, c’est le prix qui arbitrera le choix, perpétuant le cercle vicieux de la déconsommation.

Pour retrouver le chemin du goût et de l’envie, il faudrait que la filière s’organise:

– pour faire déguster les miels de terroir là où ça se passe cad pas que sur les marchés et dans les fermes, mais dans les supermarchés et les grands centres commerciaux;

– pour communiquer et sensibiliser le grand public via des spots publicitaires comme le font depuis longtemps les marques de pâte à tartiner, et notamment au travers des labels de qualité comme l’IGP ou le bio;

– pour rendre obligatoires les contrôles sur les miels d’importation avant leur conditionnement et, le cas échéant, imposer des labels de qualité de production comme d’autres filières l’ont fait sur le bois par exemple (FSC…), les contrôles étant financés par les importateurs et consultables sur un site via le numéro de lot par exemple.

Enfin il serait souhaitable que le politique appuie la filière mais dans un système ouvert à tous vents comme l’Europe on voit bien que c’est l’appauvrissement des producteurs, leur plus grande dépendance et leur disparition qui est orchestrée depuis une cinquantaine d’années et que la solution ne se trouve pas dans la politique telle qu’elle est menée depuis….

facteurs économiques

1- la hausse des charges d’exploitation

Suite à la pseudo crise sanitaire organisée par nos gouvernements, et la guerre en Ukraine, nous subissons les contraintes des conséquences des mauvais choix politiques de nos gouvernants:

– hausse du cout des équipements de miellerie (+15%)
 

– hausse du cout des moyens de transhumance (grues, remorques, véhicules)

– hausse du cout des conditionnements (verre + 20%, capsules +60%, futs +200%)

– hausse des coûts logistiques (carburants + 30%)

Il devient donc chaque jour plus difficile de rémunérer l’apiculteur qui est pris entre la hausse de ses couts d’exploitation et la baisse tendancielle des volumes de production et des prix de vente. Des exploitations ferment déjà. Seuls les installés de longue date avec un modèle commercial basé sur la valorisation via les marchés ou en vente directe peuvent subsister. A mon niveau, il est devenu illusoire de gagner de l’argent sur les ventes en vrac et je vais donc devoir rétropédaler et produire moins, avec une réduction du cheptel à la clef. Travailler moins pour gagner moins. Tel est le (triste) résultat des politiques menées depuis 30 ans sous le joug de l’Europe.

2- l’accès au foncier et à la possibilité d’édifier des mielleries

Paradoxalement il est devenu très difficile d’édifier une miellerie, essentiellement pour 3 facteurs:

– l’accès au foncier agricole ou en zone naturelle, bloqué par la Safer et destiné essentiellement au remembrement et donc à la concentration des exploitations lié au copinage, à l’appartenance au bon syndicat ou au besoin de nouveau foncier pour satisfaire aux nouveaux critères HVE sans changer véritablement de mode d’exploitation

– l’accès au foncier en raison de la flambée des prix du m2 (notamment en zone péri-urbaine, très intéressante vis à vis de la possibilité de valoriser les productions en se rapprochant des consommateurs)

– des facteurs réglementaires visant à limiter l’édification de nouveaux bâtiments et les multiples embuches et autorisations qu’il faut obtenir d’organismes peu ou pas préoccupés par l’apiculture ou le maintien de la biodiversité comme le CHAMP, les CDpenafs, les préfectures et les services d’urbanisme. En fait tous ces boulets improductifs représentent une gêne considérable pour les nouveaux installés et compromettent le remplacement des acteurs sur le départ et notre sécurité alimentaire à moyen terme.

Il est en effet en pratique pas possible de développer ni de transmettre une exploitation sans locaux ad-hoc permettant l’extraction, le stockage, le conditionnement, le transport et la manutention de 3 à 10 tonnes de miel par an.  Sans parler de la transmission du savoir et du savoir-faire aux générations futures… On a donc une grande partie des professionnels précarisés (sans miellerie fixe) et contraints de louer des locaux très onéreux en pure perte et sans possibilité de développer des produits transformés ou un point de vente permettant de valoriser les productions. Ceci nous contraignant à proposer nos produits sur le marché du vrac et donc en concurrence avec des produits en provenance de zones de productions n’ayant pas du tout les mêmes contraintes de coûts d’exploitation, sociales, fiscales, sanitaires (par exemple le cout du gazole est 40 cts moins cher en Espagne, ce qui représente sur 40 années de production une différence de 40 à 60 000 euros à lui seul… ou environ 1 euros du kilo en cout de production)

3 – l’absence de protection sociale et de remplacement en cas de pépin physique ou de maladie

Compte tenu de la situation économique, nous sommes nombreux à faire tourner nos exploitations à l’huile de coude et aux heures supplémentaires. En saison la norme est de travailler 7j/7 et toute la durée du jour travaillable (cela peut représenter 2 euivalents temps plein durant 6-7 mois…); cette situation peut conduire à une grande fatigue, des pépins physiques et du burn-out. Si cela arrive, c’est le revenu de toute une année qui peut être compromis. Et pour un élevage, l’absence peut se révéler rapidement désastreuse, même si on a cotisé à coté pour pouvoir percevoir des indemnités journalières. Avec toutes les conséquences que cela peut avoir sur les débouchés futurs (pas de récolte = impossibilité de conserver ses marchés = perte sur du long terme); il n’y a pas de solution à ce problème, juste des pis-aller comme l’appel à la solidarité et à l’entraide… l’apiculture est trop technique et trop chronophage pour pouvoir être remplacé au pied levé…

4 – la désorganisation et la multitude de syndicats (avec une opposition quasi systématique entre les syndicats de petits producteurs amateurs et les syndicats de professionnels) et avec une interprofession qui doute et qui a également du mal à s’entendre et à s’imposer sur des causes communes en raison de la divergence des intérêts de ses acteurs (filière amont et aval) mais aussi d’un manque cruel de moyens financiers…

Imposée par nos gouvernants pour n’avoir qu’un interlocuteur, le problème principal achoppe sur la convergence et l’obtention d’un consensus sur un panel de mesures et de revendications visant à être inscrites en textes de loi.

5 – les faux plans d’aide à la filière rédigés pour ne pas les attribuer

Avant de parler des faux plans d’aide, je précise juste que nous n’avons pas ou peu été aides par les dispositifs d’aide aux entreprises en difficultés lors de la période calamiteuse du Covid…Nous avons continué à faire notre travail à coups de pieds aux fesses et à coup d’auto-attestations et de contrôles de police routiers humiliants tout en se privant d’une grande part de nos revenus puisque les marchés étaient fermés ou que les gens ne pouvaient plus se rendre dans nos mielleries acheter nos produits à cause des confinements. On mesure bien le dédain et le cynisme des pouvoirs publics à l’aulne du traitement qui nous a été réservé. Ils s’en contrefichent, car il y a avait du stock de miel importé chez les distributeurs et les supermarchés sont restés ouverts, donc circulez il n’y a rien à voir. Un président a dit souhaiter emmerder certains français, mais il ne l’a pas que dit, ils l’a fait… c’est d’ailleurs une des rares réussites du pouvoir en place. Il n’y a jamais eu de « en même temps… » pour l’apiculture…

Petit bémol néanmoins : l’appui de la chambre d’agriculture du 13 et le support financier du conseil général 13 pendant cette période. Merci à eux, ils ont répondu présent au moment où on en avait besoin.

Deux plans d’aides ont été annoncés en grande pompe ces 2 dernières années : une indemnité pour calamité en 2022 sur récolte 2021 (sur dossier et sur critères sensiblement identiques au plan d’aide au Bio de 2023). Mon avis sur ces dispositifs:

Vous avez sans doute entendu parler aux infos de l’ouverture d’un fond d’urgence Bio (60 millions d’euros
destinés à la filière). Bon, ça ce sont les annonces… pour dire à la populasse qu’ils font quelque chose… Qu’en est il réellement ? En vérité en 2 mois, seules 85 exploitations ont fait une demande en PACA (ce qui est une
misère…) …Pourquoi?

De mon coté je n’ai pas fait appel a ces aides (les modalités de calamité en 2022 étaient sensiblement identiques sauf le volet Bio) et en voici les raisons:
 
1- fiscalement, je suis assujetti au micro BA et dans ce cadre nous ne sommes pas tenus de faire appel à un cabinet comptable; je ne dispose donc pas de d’historique de compte de résultats et je ne me lancerai pas dans une expertise comptable rétroactive sur 3 ans pour éventuellement bénéficier de cette aide (qui est attribuée si vous remplissez tous les critères et notamment, une baisse de 20% du chiffre par rapport à la moyenne triennale des années antérieures…
d’ailleurs il est choquant de voir que le dispositif prévoit qu’ « Elle sera au minimum de 1000 euros pour compenser le coût de l’attestation comptable »… on se demande si l’aide est destinée aux paysans ou aux comptables ? enfin bref…
 

2- je ne suis pas 100% bio même si l’essentiel (70% de ma récolte de miel) l’est… ce qui ne l’est pas a été déclassé en conventionnel pour des considérations technocratiques relatives à la transcription du cahier des charges européen discriminant certains emplacements et donc déclassant la récolte issue de ces emplacements
(ruchers à moins de 3km d’une grande ville….comme l’agglo du pays d’Aix par exemple… ce qui déclasse automatiquement des miels du Tholonnet, Meyreuil ou de Venelles… Hallucinant….; bien que toutes mes ruches soient conduites et classées en bio… une partie de ma récolte ne l’est pas). Ces dispositions peuvent se comprendre pour des grandes villes comme Lyon, Paris, Berlin etc…mais sont carrément inaudibles pour les petites villes de province sauf si un site SEVESO se trouvait à coté d’un rucher bien entendu…

Bref je ne changerai pas d’emplacements car ceux ci me donnent entière satisfaction sur tous les plans (élevage, récolte, sanitaire…); et soit dit en passant et nonobstant ce qu’il adviendra du nouveau cahier des charges bio, ce type de discrimination me fait monter la moutarde au nez, on voudrait nous décourager et nous forcer à rebasculer en conventionnel, on ne s’y prendrait pas mieux….or pour toucher les aides il faut que 100% des productions soient bio…
 
3- nous avons déjà perdu beaucoup de recettes en 2020 et 2021 liés aux annulations des foires et marchés au miel pour des raisons soit-disant sanitaires… et les récoltes 2021& 2022 on été plus que maigres en raison des sécheresses et canicules donc il n’est pas évident du tout de mettre en évidence des pertes de recettes quand on compare la période de référence aux exercices précédents puisque ceux ci ont déjà été misérables…
mais pour d’autres raisons…
 
4- je me suis organisé pour pallier à et compenser cette situation de m….. (désolé mais il faut appeler un chat un chat…) en augmentant mon cheptel et diminuant le nombre de ruches par emplacement ce qui a bien produit
l’effet escompté cad augmenter le productible et le rendement à la ruche… de ce fait je ne peux pas véritablement dire ni prouver d’un point de vue comptable que j’ai souffert de la situation bien que ces mesures m’ont couté (investissements en ruches suppl/. et en logistique (visite ruchers et transhumances) et en intrants (bio…)). Pour bien faire il faudrait mesurer à périmètre constant ce qui n’est jamais le cas en apiculture ou ce qui fait qu’on produit du miel, c’est la quantité d’eau tombée le mois précédent une miellée…
 
5- il n’y a pas un si grand écart que ca en prix de vente entre le miel bio et le miel conventionnel (et il ne reflète pas la réalité des couts et des contraintes). La majorité des consommateurs regardent le prix, donc on ne peut pas marger beaucoup plus, c’est le marché qui est comme cela/ Sinon vous ne vendez pas… donc l’impact de la baisse du bio dans le panier est du coup moindre sur le miel et dans mon secteur en tout cas. Et c’est pareil pour les ventes en vrac (depuis 3 ans)
 
Bon, bref… comme souvent, l’annonce d’une mesure de support ne produit pas les effets attendus (et pour certains, le contraire…); pour moi il s’agit d’une annonce de plus qui permet aux dirigeants de faire semblant de soutenir et compenser une filière tout en excluant un bon paquet de ses acteurs, les petitsen général. C’est de la
politique politicienne mal vue et malsaine, et c’est ce qu’on ne veut plus voir en tant que citoyens et producteurs. Basta avec cette mascarade, ces demi-mesures et tout ce cinéma et de fake-mesures à destination de l’opinion! Et je ne parle pas de la faillite de nos dirigeants dans lasanté et l’hopital, le secteur énergétique, les entreprises et
l’économie etc…
Le responsable de la filière bio à la chambre d’agriculture m’a transmis ce commentaire : ‘Oui, cette aide est sans doute discutable au vu des critères retenus (d’autres facteurs que la « crise du bio » peuvent expliquer une baisse d’EBE ou une hausse). Je pense qu’elle ira principalement vers des structures relativement grosses et sur les filières « intégrées » (animales notamment) ce qui est dommageable. La dernière aide de 10 millions d’euros au niveau national n’a permis d’aider qu’une soixantaine de fermes bios sur le département…. »
 
Alors…
oui on est administrés par une bande de clampins planqués qui se foutent de nous et qui massacrent méthodiquement tous les secteurs de la société (tout en disant le contraire…) . Le texte du fond d’aide est trop bien ficelé pour que ce soit de l’incompétence, c’est donc cynique et intentionnel….et quand nos (soi-disant)
représentants jouent contre nous ça sera difficile de s’en sortir, et pour tout le monde d’ailleurs….
 

dispensa

et

Etat cire grande 1

article en cours de rédaction, à l’état de brouillon. sera complété et développé selon mes disponibilités…

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