Le constat s’impose chaque jour un peu plus : le réchauffement climatique et l’agriculture intensive sont fatals aux insectes, abeilles comprises. Or, les abeilles ne vivent que 40 à 50 jours… dont les 20 premiers sont dédiés à l’élevage de leurs soeurs (qui viendront les remplacer), et les derniers à collecter les pollens qui permettent de les nourrir
Sans pollen, pas de renouvellement des générations, la colonie s’affaiblit, devient malade et finira par disparaitre
Pas de pollen : où sont passées les fleurs ?
Réchauffement climatique, sécheresses, canicules, coups de gel tardifs, autant de facteurs aggravants qui compromettent la ressource en pollens par la raréfaction des fleurs. Ressource déjà devenue rare et aléatoire en raison de l’agriculture intensive, de l’usage massif des herbicides, du travail des sols, de l’urbanisation, de la suppression des haies, du débroussaillage autour des bâtiments et de l’entretien des abords des routes ou des infrastructures…
Pour tout être vivant, et en particulier les abeilles, les protéines, donc les acides aminés qui les constituent, sont extrêmement importantes, et les pollens en sont une entrée quasi exclusive. Les abeilles en dépendent entièrement ; ainsi une ruche nécessite une quantité comprise entre 17 et 34 kg de pollen par an. Mais au-delà de la quantité, il faut impérativement une diversité importante de pollens pour assurer l’apport en acides aminés essentiels.
Les pollens sont la clef pour assurer la bonne santé des abeilles toute l’année, pour assurer une bonne population, pour en préparer l’hivernage et pour les protéger face aux multiples stress qu’elles affrontent, notamment les maladies, le varroa, mais aussi la résistance au frelon.
Le choix des emplacements, les transhumances et le stockage pour pallier à la pénurie de pollens
Avant de déterminer si un emplacement va pouvoir subvenir aux besoins des colonies, il est nécessaire d’étudier en profondeur les ressources disponibles alentour dans un périmètre de 3 km aux différents moments de l’année de sorte à déterminer combien de ruches pourront s’y trouver et durant quelles périodes.
Il est également crucial de ne pas prélever de pollens en excès au moment où les abeilles en ont besoin, ni lorsqu’elles sont en mesure de constituer des réserves, quitte à stocker des cadres de pollen au congélateur et les réintroduire pendant les périodes de disette dans des ruches qui en ont besoin. En effet la période pendant laquelle ces ressources s’amenuisent voire disparaissent a tendance à s’accroitre d’année en année en raison de floraisons plus précoces et d’un été plus long. Il n’est pas rare de manquer de pollen pendant 4-5 mois en basse Provence (Mai-Septembre) et dans ce cas seul le nourrissement ou la transhumance sur un lieu plus favorable peuvent permettre la survie des colonies (notamment les essaims tardifs qui n’ont pas eu le temps d’amasser des réserves). On peut également dépeupler et mieux répartir les colonies mais gare au frelon asiatique…
En effet sa présence dès la fin de l’été va encore aggraver cette situation en prélevant des butineuses et en empêchant les rotations. Les frelons stressent également les nourrices à l’intérieur de la ruche et peuvent provoquer un blocage de ponte. On peut considérer qu’on est déjà dans une phase de pré-extinction et que sans l’intervention de l’apiculteur, l’abeille ne serait plus qu’un lointain souvenir dans certains territoires…
La conduite de ruchers en biologique complexifie encore un peu plus la gestion des colonies dans la mesure ou certaines ressources florales doivent être exclues des aires de butinage (grandes cultures comme colza/tournesol…) et que les secteurs naturels ou sauvages, au delà de leur rareté, ne pourvoient pas les abeilles en pollen durant de nombreux mois (secteur Calanques, côte bleue, Sainte-Baume ou Sainte-Victoire).
Pour ces raisons, les emplacements péri-urbains, même s’ils peuvent aboutir à un déclassement des produits de la ruche de bio en conventionnel, se prêtent mieux à la santé et la résilience des colonies par la présence de ressources tardives comme le tilleul, la ronce, le savonnier, le troenne, et les massifs floraux artificiels (lavandes…), ou de cultures de fourrages comme le sainfoin ou la luzerne… à condition d’être irriguées…
Ainsi l’apiculteur bio devra jongler entre ses emplacements en fonction de la présence ou de l’absence des ressources artificielles dépendant de l’assolement fixé chaque année par les agriculteurs voisins, des contraintes imposées par le règlement biologique, du nourrissement (seulement si indispensable …mais toujours risqué vis à vis de l’adultération du miel, et toujours onéreux…) , l’équilibrage des colonies, en fonction du déroulement de la saison, et le cas échéant transhumer (avec les surcouts induits par la crise énergétique…) ou reconstituer son cheptel (en raison des pertes) au détriment de la production de miel de printemps.
Enfin, il est à noter que malgré tout le soin apporté à positionner correctement les colonies dans des emplacements où elles peuvent trouver quelques ressources (ou constituer des réserves au préalable…) 2 menaces entravent le développement des colonies en été : le manque d’eau et la canicule. En effet, sans eau, impossible de maintenir une température et un taux d’humidité acceptables dans la ruche, et impossible de préparer la bouillie de pollen à donner aux larves… Les conséquences du réchauffement climatique et de la présence simultanée de frelons va donc provoquer une baisse de population en été et les cadres abandonnés risquent d’être laissés en pâture à d’autres prédateurs comme la fausse teigne (papillon), avec pour conséquence la destruction des cadres de réserve par les larves de teigne si la population d’abeille vient à diminuer de manière trop importante (exemple : abeilles repliées d’un coté occupant moins de 3 cadres sur les 10). Sécheresses et canicules constituent donc un risque majeur pour la survie de l’abeille domestique, risque qui va s’aggraver pour les siècles à venir…
La survie de nos abeilles est devenue de plus en plus aléatoire (voire impossible sans l’intervention de l’homme) et induit donc un cout important de nos jours, l’environnement ayant complètement changé en 50 ans… ce surcoût se retrouvera forcément à un moment dans le produit final (qui au demeurant a assez peu augmenté et reste assez peu onéreux compte tenu du travail pour l’obtenir et de l’aléa lié à sa production..). Derrière le miel, il y a des enjeux majeurs : 1-notre sécurité alimentaire (disponibilité), 2- des prix des fruits et légumes contenus, mais surtout 3-l’avenir de nos enfants et de l’humanité…
PS : si vous lisez ceci c’est que l’article vous a intéressé, vous aurez sans doute compris que nous ne prélevons pas de pollen à nos abeilles sauf s’il est véritablement en excès et qu’il risque de « bloquer » le développement de la colonie à un instant crucial de la saison. Ce pollen sera stocké au frais et redistribué aux abeilles car en apiculture biologique il n’existe pas de compléments alimentaires protéinés de substitution…Si vous souhaitez néanmoins vous en procurer par ailleurs en tant que complément alimentaire, ce produit est plein de bienfaits, à conditions qu’il soit frais ou congelé. En alternative le pain d’abeille est aussi excellent, voire plus digeste et donc mieux assimilé. Faites le choix du bio car dans le cas contraire, vous n’êtes pas à l’abri de récupérer quelques molécules de traitements phytosanitaires au passage…
Manger du miel de producteur c’est préserver la biodiversité et notre sécurité alimentaire.
Manger du miel biologique c’est aussi préserver la planète et votre santé.
Manger du bon miel c’est se faire plaisir. Offrir du miel c’est offrir tout l’amour des abeilles dans un pot.
Venez goûter nos miels !